Architecture remarquable — Auteur : — Description de l'édifice
Construite sur un terrain de 14 hectares situé en plein quartier du Wacken, la cité Ungemach est édifée sur une presqu’île délimitée par la rivière Ill, traversant la ville ancienne, par son confluent l’Aar, se déployant dans la Neustadt, et par le canal de la Marne au Rhin. Le site dispose de qualités paysagères remarquables caractérisées par des allées d’arbres, des maisons alsaciennes, des bâtiments industriels en bois, des près et des jardins potagers. Le cadre pittoresque de la cité, souvent poétique, en fait un lieu de promenade apprécié. Le plan d’ensemble intègre la cité-jardin dans un territoire plus vaste comprenant un parc d’exposition dans la proximité immédiate de la cité-jardin au nord, et une autre cité-jardin située dans l’axe majeur de celle d’Ungemach. Il conserve certains tracés urbains anciens (comme l’allée du Printemps) ainsi que des platanes centenaires. Contrairement à la majorité des réalisations des cités-jardins centrées autour d’une place centrale pourvue d’équipements socio-culturels, la cité-jardin Ungemach est centrée sur un axe majeur composé de rues et places (la rue des Jacinthes entrecoupée par la place des Acacias) traversant son centre du nord au sud. Il s’agit d’un tracé droit composé dans la tradition néo-classique, allant de la rivière l’Aar jusqu’aux limites nord de la cité. Le plan de la cité Ungemach est rationnel et géométrique là où la confguration des limites de terrain le permet ; ailleurs, il est organique. Il est fondé sur un système d’îlots et de parcelles qui annonce les méthodes du Mouvement moderne en matière d’aménagement des cités-jardins. Les îlots nouveaux, principalement rectangulaires, assurent un regroupement rationnel des maisons unifamiliales. La forme architecturale de la cité est très homogène. Son architecture est d’inspiration régionale. Les maisons sont couvertes de toits à forte pente en tuile, éclairées par des lucarnes rampantes qui caractérisent les habitations des villages de la région. La cité se compose de 138 petites maisons (contre 150 souhaitées dans le programme) de six types (contre deux initialement prévus) et séparées les unes des autres par un jardin attenant de six ares. Leur surface varie de 100 à 165 m². Ce sont toutes des maisons unifamiliales présentant deux niveaux : un rez-de-chaussée destiné principalement au foyer de l’habitation et un étage mansardé. L’articulation des pièces est conçue pour faciliter le confort de ses habitants. Les pièces principales sont ouvertes sur le jardin. Chaque maison est dotée d’un confort domestique de haut niveau pour l’époque : électricité, gaz, eau courante, toilettes et poêle compris dans le prix de revient. Lors de sa construction, les prestations assurées par la cité-jardin Ungemach sont supérieures à celles offertes par les logements sociaux. Les loyers pratiqués sont inférieurs à ceux des locations privées (prix des maisons fxé par la fondation entre 52 000 et 62 500 francs). Il est prévu que les ménages qui logent dans ces maisons cèdent leur place à de plus jeunes parents, une fois leurs enfants devenus grands.
— Histoire
Soucieux de faire bénéfcier la communauté de sa fortune, l’industriel strasbourgeois Léon Charles Ungemach créé la fondation Ungemach en janvier 1920. Il est à l’origine de la construction de la cité-jardin Ungemach destinée, selon l’acte de création de la fondation, « aux jeunes ménages en bonne santé désireux d’avoir des enfants et de les élever dans de bonnes conditions d’hygiène et de moralité ». Dans les années 1920, Strasbourg devient l’une des trois premières agglomérations, avec Lille et Paris, qui lancent en France le plan d’aménagement et d’extension (Strasbourg en 1924). La loi relative au déclassement de l’enceinte fortifiée de Strasbourg et la cession gratuite des terrains militaires à la Ville établie en 1922 prévoit que des logements sociaux et des cités-jardins puissent être construits sur 10 % des terrains grevés de la servitude non aedificandi. Un contrat est signé entre la Ville de Strasbourg et la fondation Ungemach en février 1923 pour la cession du terrain sur lequel sera construit la cité-jardin. Le concours, lancé en 1924, réunit vingt-deux projets, dont sept étrangers. Le jury, sélectionné en partie par la Société française des urbanistes (SFU), est composé notamment de Le Corbusier, désigné par les concurrents eux-mêmes. Le programme prévoit la construction de 150 maisons de deux types. Il indique qu’une grande attention est portée à l’aspect extérieur de la cité-jardin ainsi qu’au confort des habitations. L’aménagement du terrain, dont le fnancement incombe à la Ville, est confié à l’architecte alsacien Gustave Oberthür, ancien élève de Karl Schäfer de la Technische Hochschule de Karlsruhe. L’architecte conçoit pour la fondation un plan d’aménagement des terrains obligeant les futurs concurrents du projet à envisager un phasage en trois étapes temporelles dans la construction, rendant ainsi l’aménagement moins onéreux pour la Ville. Le plan est contresigné par l’architecte alsacien Paul Dopff, qui devient l’architecte en chef de la Ville de Strasbourg après le retour sous le giron français et réalise de nombreux logements sociaux et cités d’habitations collectives dès la fin des années 1920. Le premier prix du concours est décerné à l’architecte d’origine mulhousienne, Paul de Rutté, et particulièrement apprécié par le maire socialiste de Suresnes, Henri Sellier, qui est à l’origine des cités-jardins de Dugny, Drancy, Châtenay-Malabry et Boulogne, conçues par les architectes Joseph Bassompierre et Paul Sirvin. Le quatrième projet primé est celui de Jean Sorg, jeune architecte strasbourgeois et protégé de Paul Dopff. Les second et troisième prix auraient été attribués à Bassompierre et Sirvin. Ces quatre architectes sont visés pour concevoir la cité-jardin Ungemach.