Architecture remarquable — Auteur : — Description de l'édifice— Histoire
Le promoteur tourangeau François Pillot et son entreprise Art et Bat se font connaître, au début des années 1980, par quelques opérations atypiques de logements dont le volontarisme formel tranche avec le classicisme un peu fade qui caractérise alors la ville de Jean Royer. Une demande de permis de construire est déposée, en juin 1986, pour la construction d’un immeuble de standing dans le quartier huppé des Prébendes, dans le centre de Tours. Les remous provoqués par l’esthétique nouvelle du projet et son insertion dans un quartier dominé par les « particuliers », ces maisons bourgeoises caractéristiques de la ville, repoussent la mise en chantier, l’achèvement des travaux intervenant en 1989. L’ensemble du 59 rue Origet se compose de deux corps de bâtiments de quatre étages, bâtis sur une parcelle perpendiculaire à la voie. Le découpage complexe des volumétries, en particulier sur les niveaux de combles, permet le respect des règles de prospect tout en adoucissant l’insertion urbaine de l’immeuble ; le bâtiment à l’alignement sur rue est aussi précédé d’un avant-corps sur deux niveaux, évoquant trois petits hôtels particuliers mitoyens. Une faille donne accès au cœur d’îlot et à un escalier monumental menant à une coursive située au deuxième étage, ponctuée par un ascenseur placé à la jonction des deux bâtiments. L’utilisation de demi-niveaux permet une rationalisation substantielle des circulations communes en même temps que le déploiement de typologies rares dans le logement collectif, allant jusqu’au triplex. La distribution intérieure des appartements multiplie les volumes concaves et convexes, toujours dans le but d’animer le parcours architectural. Si certaines pièces ne sont, exceptionnellement, qu’éclairées en second jour, la plupart des logements possèdent des terrasses renforçant le caractère de villas superposées exprimé par la résidence. Les lignes extérieures surprennent par leur éclectisme : le dessin complexe de l’architecte Roger Ivars associe les références corbuséennes à des oriels et des demilunes typiques du post-modernisme alors dominant. Les enduits clairs sont utilisés comme revêtement de façade, tandis que les pignons sur rue mêlent la brique aux pavés de verre, rappelant l’ancienne vocation industrielle du site. Les circulations sont enfin parées de carrelage Buchtal. Produit de la rencontre entre un promoteur avisé et l’un des architectes les plus remarquables du milieu local, l’immeuble du 59 rue Origet est le témoignage le plus abouti, à Tours, des possibilités des années 1980.